Marcel Bourgoin |
Comment trouver des traces ?
Mes souvenirs admiratifs de mon grand-père ne me permettaient pas de retracer son action municipale. Je me demandais donc comment j'allais m'y prendre pour retracer cette longue période d'engagement local.
Des photos
Je fouillais dans les archives qui m'avaient été confiés par ma mère. Des photographies non triées et des cartes postales anciennes. Dans les albums de ma Grand-mère Germaine Guibert-Bourgoin, de rares photos de mon grand-père dans ses fonctions municipales. De plus ou moins bonne qualité. Je pouvais les mettre de côté mais cela ne saurait me suffire.
Des témoignages
Je décidais d'interroger le souvenirs de ma tante Nicole Frochot, qui était restée au village. Elle a fouillé ses cartons dans lesquels elle avait rangé des documents d'époque : bulletins de vote, profession de foi souvent jaunis et à travers lesquels je revis les combats électoraux locaux animés.
Une vidéo
J'ai retrouvé une cassette vidéo qui avait été réalisée par mon oncle lors du décès de mon grand-père en 1991. Il avait retracé des points forts de leur vie. Quelle difficulté pour retrouver un magnétoscope, le brancher, et lire ce document fatigué. S'exprimaient quelques administrés qui évoquaient l'action de grand-père en tant qu'élu, en lui rendant hommage. C'est bref, mais le personnage se dessinait avec plus des contours plus précis.
Les registres municipaux
Je remercie la mairie de Chailley qui m'a ouvert ses registres du conseil municipal afin que je puisse relater les principales décisions prises par les conseils municipaux sous son autorité. J'ai pu plonger dans les registres reliés conseil municipal à la Mairie de Chailley. Les décisions et vote de chaque conseil sont minutieusement consignés. J'ai pu retracer les principales réalisations municipales au cours des mandats. J'ai regretté ne pas retrouver dans ces registres, les discussions ou interventions des élus qui auraient permis de donner un peu plus de caractère et de vie aux descriptions. Mais seuls les votes sont retranscrits. Je vais devoir m'appuyer sur les faits pour évoquer cette action municipale et retracer un bilan des mandats de Marcel Bourgoin, en hommage à mon grand-père.1944 : Le début de l’engagement municipal
Plan de Chailley en 1949 |
La réfection du réseau électrique
Le 26
juin 1946, le conseil municipal décide de la réfection des réseaux électriques
enlevés par ordre des autorités allemandes. Il est indispensable de réparer le
réseau électrique et de pourvoir à nouveau à l’éclairage des rues et places
publiques de la commune. Des habitants se souviennent des lampes à pétrole et
des coupures électriques nombreuses. La réparation ne suffit pas à répondre aux
nouveaux besoins de la population en électricité. En 1949, la création d’un
syndicat d’études est projetée, pour la modernisation électrique qui regroupe
les communes environnantes. Le nom est Syndicat d’études pour la
modernisation de la distribution de l’énergie électrique dans la région de
Saint Florentin-Brienon. Le projet est financé en partie par
souscription publique avec l’édition de 400 obligations de 5 000 francs
chacune.
La bataille de l’eau potable
Un puits public à Chailley |
Un long processus
s’enclenche pour gagner la bataille de l’eau. Certains habitants de
Chailley se souviennent encore de l’époque où, enfants, ils vont chercher l’eau
au puits. L’eau courante arrive dans les maisons. Les corvées ménagères
s’allègent. Le confort gagne le village. On est en 1953.
L’hommage aux morts de la
guerre
Le 6 février 1947, le conseil municipal
décide de faire graver sur le monument aux morts le nom des victimes de la
guerre. Les noms de Lespagnol Félix, décédé, Cormeau Lucien et Bourgoin Henri
fusillés, Chambrelan Raymond mort en déportation, Roland Butteau engagé
volontaire sont les noms proposés.
1959 : Elu Maire
Adjoint
Le 12 février 1959, Marcel Bourgoin,
alors simple Conseiller municipal, est élu 1er adjoint au
Maire Gaston Renuzeau.
Les réalisations communales du Maire Marcel Bourgoin 1965-1983
Aux élections du 14 mars 1965, Marcel Bourgoin présente sa liste intitulée « Liste de rénovation municipale et de progrès économique et social ». Il trace les lignes de son futur mandat. « Nous avons accepté de solliciter vos suffrages… dans le but d’œuvrer efficacement pour que notre Chère Commune soit de plus en plus prospère, que l’entretien des bâtiments collectifs, de nos écoles, de nos routes et de nos chemins soit meilleur. Il y a en outre des initiatives à prendre. A cet égard, dans le cadre de la décentralisation industrielle, nous pourrons sans doute provoquer l’installation d’une petite usine qui animerait l’économie locale, ferait prospérer notre commerce et augmenterait les ressources de la Commune par la taxe locale…Tous nos efforts porteront sur la bonne administration, la bonne gestion des affaires communales, pour le bien de tous les Chaillotins ».
Assainissement - Trottoirs
Le premier dossier qu’il traite est celui
de l’assainissement de la commune. Le besoin se fait sentir de compléter
l’équipement de Chailley et du Vaudevanne par un réseau d’égouts. Le service du
génie rural des eaux et forêts procède, à la demande du conseil
municipal, à l’étude d’un avant-projet général d’assainissement. C’est en
1969 que démarre ce projet qui aboutit en 1979. Cet assainissement est suivi de la création quelques années plus tard des
trottoirs et de l’évacuation des eaux pluviales.
Rénovation des bâtiments
communaux
Les bâtiments communaux sont rénovés,
comme il l’avait promis. En 1970, débute la rénovation de la Mairie, conduite
par l’Architecte Louis Colin d’Auxerre. C’est la période des grands travaux dans la commune.
Ecoles du Bourg
Marcel Bourgoin sait que la vitalité du
village implique le maintien puis le développement des écoles. Il s’investit
pleinement dans ce chantier qui lui tient à cœur. Les deux écoles du Bourg
connaissent des gros travaux de réhabilitation. Les travaux s’élèvent à la
somme de 9 852 francs. En 1973, la
classe enfantine qui devient l’école maternelle est installée au centre du
village ; en 1975 est créé un poste à temps partiel d’agent
municipal pour aider l’institutrice.
Développement industriel
L’entreprise La Chaillotine prend de
l’expansion et emploie de plus en plus d’ouvriers à Chailley. En 1970, le
conseil municipal donne un avis favorable à la demande d’extension de
l’entreprise et de l’implantation de la société Les traiteurs bourguignons. La
zone industrielle de Chailley est lancée.
Desserte téléphonique
En 1979, la desserte téléphonique de la
commune, prévue en 1977 est terminée.
Constructions
Du fait du développement de l’entreprise
locale, la demande de logements s’accroît. C’est pour cette raison que le
conseil municipal autorise en 1973 la construction de pavillons individuels sur
une parcelle de 2 ha 50 sur le chemin des rompies. L’avant projet est la
construction de 20 logements HLM sur deux tours de 3 niveaux. Heureusement
c’est le projet de pavillons qui est retenu. Chailley connaît son premier lotissement.
Fort du développement de sa commune,
Marcel Bourgoin pense que des communes associées pèsent davantage vis-à-vis des
instances départementales. Il est le précurseur des communautés de communes connues
de nos jours. Il impulse un projet d’association entre les deux communes
de Chailley et de Turny. En 1974, une demande de fusion est déposée auprès du
Préfet. Elle est acceptée et le conseil municipal comprend 13 élus, 6 pour
Chailley et 7 pour Turny.Toutefois, L’association ne dure que 4
ans. Turny souhaite reprendre son autonomie. Une pétition des habitants est
envoyée aux pouvoirs publics. Le Préfet décide le 19 décembre 1978, la
séparation des deux communes associées et le conseil municipal est dissout le
31 décembre 1978. De nouvelles élections se déroulent les
11 et 18 février 1979. Le nouveau conseil municipal se compose de Marcel
Bourgoin, Willy Deketelaere, Suzanne Brière, Etienne Frochot, Marcel Félix,
Henri Laperche, Jean Cyganko, Charles Marty, Jean Paul Chartron, Anne Marie
Allot, Pierre Dumoulin, Bernadette Tomaszewski. Marcel est réélu Maire.
Activités sportives
Le conseil municipal, sous l’égide de son
Maire, subventionne les activités sportives de la commune. C’est ainsi qu’en
1971, les procès-verbaux de la Mairie indiquent que le conseil municipal décide
d’accorder une somme de 1 200 francs à la section cycliste de l’entente
sportive florentinoise pour l’organisation de deux courses cyclistes prévues à
l’occasion de la fête patronale du 25 juillet 1971. En 1975, Chailley accueille
le passage du Tour de France. La subvention pour cet événement est de 500
francs. Avant la fin de son mandat de Maire, sont
créés un terrain de football à l’entrée du village et un terrain de tennis près
du cimetière.
Personnes âgées
La commune accueille des résidents
permanents mais aussi des retraités de la région parisienne de plus en plus
nombreux. Marcel Bourgoin est à l’initiative de la construction d’un équipement
destiné aux ainés. Une salle est édifiée. Des rencontres, repas, tournois de
jeux de société, etc... sont organisés. Elle est gérée par l’association «Les
Colchiques» dont mon grand-père devient le premier Président.
Bibliothèque
Le conseil municipal met à la disposition
de la bibliothèque une classe préfabriquée à partir de 1979. La bibliothèque
est installée dans ses locaux actuels lors du mandat suivant.
Combats municipaux
La vie municipale est active à Chailley.
Les opposants sont regroupés autour de M. Charbonnier. Il présente à chaque
élection une liste d’opposition. Les campagnes électorales sont parfois
virulentes. En 1971, André Charbonnier est élu conseiller municipal. Il obtient
5 voix pour sa candidature de Maire. Marcel avec 7 voix est réélu Maire. Le
conseil municipal est partagé. Il se compose de Willy Deketelaere élu
premier-adjoint, André Charbonnier, Marcel Félix, Jacques Renuzeau, Germain
Leloup, Charles Marty, Guy Jalouzeau, Raymond Grellat, Gabriel Compagnon,
Etienne Frochot et Louis Charton. Etienne Frochot est nommé responsable de la
commission des bâtiments communaux et de la commission des eaux.
1983 : A la fin de sa
mandature, après 39 ans d’engagement municipal,
Il écrit une lettre aux
électeurs et électrices
Avec mes collègues du conseil municipal, je me suis
efforcé, dans la mesure de mes moyens, d’améliorer le patrimoine
communal : logements sociaux, réseaux d’eaux et d’assainissement, écoles,
bâtiments communaux, trottoirs…etc. Le montant de vos impôts est nettement
moins élevé que dans de nombreuses communes environnantes. Il est vrai que nous
sommes aidés par l’usine alimentaire qui supporte 60 % de l’imposition totale.
Ne demandant pas le renouvellement de mon mandat (il y a un âge où il faut être
raisonnable) je souhaite que vous apportiez vos voix et toute votre confiance à
la liste d’entente municipale qui se présente à vous.
Je resterai toujours tant que je le pourrai, à votre
disposition.
Vive Chailley Le Maire sortant
Témoignages
Etienne Frochot,
Conseiller municipal : « C’était un homme à qui on faisait
confiance. On le sentait capable de gérer une commune. Il avait bien géré sa
petite affaire…Il était capable de diriger les autres….Marcel, c’était l’homme
de confiance de la commune »
Mme Laperche,
Secrétaire de mairie de 1966 à 1978 « Il a fait faire un grand
pas en avant à la commune »
M Pourrain,
Conseiller général : « C’était un homme mesuré mais qui ne
restait pas en arrière. Il n’avait pas peur de faire les investissements qui
convenaient pour sa commune puisse évoluer et les gens puissent vivre avec leur
temps. C’est un des signes caractéristiques de Marcel Bourgoin »
Véronique
Battut-Bourgoin, sa petite fille « Je le vois s’habiller avec
soin, visser son chapeau sur sa tête, porter son sac en cuir sous le bras et
descendre chaque jour à la mairie. Il prend à cœur sa fonction. Les habitants
viennent à des heures impromptues pour le voir. Il est toujours disponible. Les
appels téléphoniques sonnent à toute heure. Ma grand-mère répond souvent. Les
disputes de voisinage, les inondations, les feux de broussailles tout est
traité par le premier magistrat de la ville. Je me souviens de cet
appel téléphonique en pleine nuit. Un habitant menace de tirer sur tout le
monde, enfermé dans sa maison. C’est la panique. Mon grand père se
rend sur place, la nuit, appelle les pompiers volontaires et ne revient qu’au
petit matin épuisé. L’affaire a trouvée une issue positive. Le forcené a cessé
son chantage. Ma grand-mère et moi avons eu tout de même très peur. Je me
souviens de son bonheur d’assumer cette fonction, de se sentir utile
pour son village. Il est attentif à chacun, disponible, représente de façon
efficace sa commune. Pendant ses mandats successifs, il a le souci de préserver
et l’ambition d’améliorer le patrimoine communal. »
1 commentaire:
Quel personnage, et quel bel hommage Véronique !
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