PRISONNIER, LE 16 JUIN 1940
Cinq
ans seulement après son mariage, Marcel Bourgoin, mon grand-père, est rappelé à l’activité militaire le 2 septembre 1939 en qualité de Sergent
chef. Il
est fait prisonnier le 16 juin 1940. Après
avoir été « stocké dans un camp à Auxerre », il est envoyé au Stalag
II B en Poméranie.
Souvenons-nous
«
Après 3 jours de voyage dans un train à bestiaux, nous arrivons sur le
lieu de destination. Nous approchons d’un terrain entouré d’une double
clôture de barbelés où il y a plusieurs baraquements. Sur
le portail, l’inscription STALAG IIB… »
Pétales d’une rose blanche Stanisław Gryniewicz
Dessin de Marcel Bourgoin Prisonnier Camp d'Hammerstein le 11 septembre 1940 (Archives familiales) |
STALAG II B Hammerstein
Le stalag II B est créé fin septembre 1939. Il dépend de la
Kommandantur de la Zone militaire II basée à Szczecin (Stettin). Il est
situé à côté de Czarne (nom allemand : Hammerstein) de la région de
Człuchów (nom allemand : Schlochau) à l’emplacement du polygone militaire.
Situation géographique Stalagh 2B |
Un des premiers camps de concentration
En
avril 1933, trois mois après l’arrivée au pouvoir d’Hitler, on crée ici un des
premiers camps de concentration destinés aux prisonniers communistes allemands
et aux opposants du régime national-socialiste. Ce camp est fermé après
quelques mois d’existence et les prisonniers sont transportés ailleurs. Les
locaux sont ensuite occupés par l’armée. Probablement à cause de ces conditions
d’existence antérieure, le gouvernement allemand décide d’organiser un
camp pour prisonniers de guerre. Il est très proche de la frontière entre le
IIIème Reich et la Pologne. Le
transport est facile, le terrain très forestier et peu d’habitants.
Au
début au Stalag IIB, il n’y a que des prisonniers polonais de l’armée Pomorze
suite à la guerre contre la Pologne début 1939. Le premier commandant du camp est
le colonel Janus, ensuite le major Van Heydebrand. Au Stalag IIB, il
existe un hôpital pour les prisonniers organisé par des prisonniers médecins
polonais, qui devient avec le temps l’hôpital central pour les
prisonniers de la région de Szczecin. En
été 1940, après la capitulation de la France, on ramène dans ce camp des
prisonniers français, aussi bien de l’armée métropolitaine que de l’armée
coloniale, puis des soldats belges, hollandais et des anglais qui combattent
en France . En 1941, après la campagne des Balkans, des prisonniers
yougoslaves arrivent. Après l’automne 1941, suite à l’attaque de la Russie par
Hitler, pendant la première phase de la guerre, on ramene des russes par
dizaine de milliers. A
cette époque, est créé un nouveau camp de l’autre côté de la voie de chemin de
fer. Deux camps distincts sont organisés : Lager Nord et Lager Ost qui
portent un nom commun, Stalag IIB Hammerstein. C’est dans ce camp, que mon
grand père est amené, dans des trains à bestiaux successifs, dans un très long
périple.
Fleischerei Wilke
Mon
grand-père, exerce la métier de Boucher. Il est donc affecté, comme prisonnier
de guerre, MATRICULE 86/96, au KOMMANDO N°210, dans une boucherie
« fleischerei » dirigée par Emil Wilke située à Hammerstein, 33
preussischesstrass. Son camarade
de captivité, André Desvallois, Charcutier à Limoges est son ami pour la vie et témoigne. Comme mon
grand père il est amené au Stalagh dans des wagons à bestiaux. André reste
prisonnier de 1939 à 1945. La boucherie
Wilke prépare la viande destinée aux militaires allemands. Les 11 prisonniers
français sont rejoints chaque jour par 20 travailleurs allemands. Les
prisonniers français dorment dans un baraquement en bois chauffé par un poêle à
bois. Le baraquement est situé contre la boucherie. Ils dorment sur place. Des
lits à trois étages sont disposés dans la petite salle rudimentaire avec un seul
lavabo. Ils disposent du minimum pour manger mais arrivent à soustraire à leurs
geôliers quelques morceaux de viande qu’ils font griller en cachette
directement sur le poêle. Le soir,
avant de dormir leur seule occupation est de jouer aux cartes. Parfois ils sont
autorisés à se baigner dans un lac. Il en garde un souvenir émerveillé. Mais
jamais ils sont autorisés à se rendre au village. Marcel devient vite chef
d’équipe dans ce petit groupe de prisonniers et coordonne le travail de tous.
Lorsque Marcel quitte la boucherie deux ans plus tard, il dit avoir perdu un
frère.
Marcel Bourgoin et les 11 prisonniers français à la Fleischerei Wilke - Stalagh IIB (Archives familiales) |
Après la
libération, les deux couples amis et ne se quittent plus de vue. Mon grand-père parle quelques mots d’allemand et il aime s’en souvenir. Il est un ardent partisan de la réconciliation
franco allemande. Sous son impulsion , Chailley est jumelée à un village allemand
« Gladbach ».
Livret militaire Marcel Bourgoin (Archives familiales) |
Marcel Bourgoin Carte anciens combattants (Archives familiales) |