En généalogie, j'aime évoquer mes ancêtres et retrouver leurs modes de vie, leurs métiers, leurs lieux d'habitat. Puis je me suis posée une question : pourquoi ne pas évoquer ma vie ? En tous cas, témoigner de mes souvenirs d'une certaine époque que j'ai traversée. J'ai connu tellement de transformations, de changements en moi et autour de moi. Car je suis une enfant de l'après-guerre. Une période qui va connaître des avancées technologiques formidables, une croissance économique réelle, des avancées sociales et des bouleversements sociétaux. Je les ai vécu sans toujours en prendre conscience. J'ai envie aujourd'hui de me retourner sur ces évolutions, et sans nostalgie, témoigner d'une époque si récente et déjà si lointaine.
Je suis une enfant de la fin de l'année 1956. C'est une année qui a connu un record de froid avec des températures inférieures à -20°C dans la plus grande partie de la France. Sous la IV° République, le Front républicain regroupant la SFIO et les radicaux viennent de gagner les législatives et le Président René COTY propose à Guy MOLLET de gouverner le pays.
Nous sommes 800 000 enfants à naître cette année là. Mes parents ont choisi un prénom original Véronique, qui tranchait un peu avec les Martine, Françoise, Chantal... de l'époque. Jusqu'à 1974, année de mon baccalauréat, nous allons traverser des évolutions sociales, politiques d'importance. Je serais spectatrice des évènements de 1968, trop jeune pour y participer, mais suffisamment consciente pour sentir l'ancien monde basculer. La société de 1974 n'aura plus grand chose à voir avec celle de l'année 1956. J'aurais l'occasion de revenir sur ces riches années. Aujourd'hui, permettez moi d'évoquer l'année et les circonstances de ma naissance.
Je suis une enfant de la fin de l'année 1956. C'est une année qui a connu un record de froid avec des températures inférieures à -20°C dans la plus grande partie de la France. Sous la IV° République, le Front républicain regroupant la SFIO et les radicaux viennent de gagner les législatives et le Président René COTY propose à Guy MOLLET de gouverner le pays.
Nous sommes 800 000 enfants à naître cette année là. Mes parents ont choisi un prénom original Véronique, qui tranchait un peu avec les Martine, Françoise, Chantal... de l'époque. Jusqu'à 1974, année de mon baccalauréat, nous allons traverser des évolutions sociales, politiques d'importance. Je serais spectatrice des évènements de 1968, trop jeune pour y participer, mais suffisamment consciente pour sentir l'ancien monde basculer. La société de 1974 n'aura plus grand chose à voir avec celle de l'année 1956. J'aurais l'occasion de revenir sur ces riches années. Aujourd'hui, permettez moi d'évoquer l'année et les circonstances de ma naissance.
Mars 1956 : Le mariage de mes parents dans l’Yonne
Mes parents Arlette BOURGOIN et Jean BATTUT, instituteurs
formés à l’Ecole Normale d’Auxerre, dans laquelle ils se sont rencontrés, se marient
dans la commune de Chailley dans l’Yonne le 26 mars 1956. Arlette a 21 ans, Jean 23 ans.
Septembre 1956 : L’école de campagne dans les vallons du Morvan
Mes parents sont affectés à la rentrée scolaire dans une
école de campagne située en plein champ, en Bourgogne, dans le Nivernais, au pied du massif du Morvan, à égale distance du bourg de
Courcelles et de Chivres.
Mon père raconte qu'un grimoire qu'il avait découvert montrait qu'on avait ainsi tranché au moment de décider de la construction de l'école à la fin du XIXème siècle. Je le cite : "l'avantage de la pleine campagne c'est que chantaient dans notre cour les faisans descendus du coteau tout proche et que le parfum de la reine des près de la prairie où coulait la paisible Sainte Eugénie se mêlait aux senteurs du gros tilleul dans lequel bourdonnaient les abeilles"
Courcelles est une commune qui compte 231 habitants au recensement de 1954. Le maire est depuis 1950, M. Louis François agriculteur.
Ma mère enseigne aux 21 élèves de la classe des petits de la classe enfantine aux CE1. Mon père enseigne dans la classe des 21 grands du CE2 à la classe de fin d’études, qui prépare au certificat d’études primaires. Ils sont logés sur place, dans le logement de fonction de l'école, qui ne possède pas l'eau courante.
Situation du village de Courcelles dans la Nièvre |
Mon père raconte qu'un grimoire qu'il avait découvert montrait qu'on avait ainsi tranché au moment de décider de la construction de l'école à la fin du XIXème siècle. Je le cite : "l'avantage de la pleine campagne c'est que chantaient dans notre cour les faisans descendus du coteau tout proche et que le parfum de la reine des près de la prairie où coulait la paisible Sainte Eugénie se mêlait aux senteurs du gros tilleul dans lequel bourdonnaient les abeilles"
Courcelles est une commune qui compte 231 habitants au recensement de 1954. Le maire est depuis 1950, M. Louis François agriculteur.
Chemin de campagne à Courcelles |
La maitrise de la fertilité n’est pas une chose facile pour
les couples. Le débat sur le contrôle des naissances n’en est qu’à ses débuts.
La contraception est alors interdite par la loi. C’est donc tout naturellement
que je nais 9 mois après la date du mariage, le 22 décembre 1956.
22 décembre 1956 : Une naissance mouvementée dans la neige
Faire part de naissance 22/12/1956 |
L’histoire de ma naissance est une aventure. Il faut
imaginer que mes parents ne possédaient qu’un scooter et un vélo leur avait
été prêté.
La cuisinière ronfle bourrée de bûches en cette nuit du 21 décembre 1956. C'est le dernier jour de classe avant les vacances de Noël. Ma mère se plaint de ses premières contractions dans la
nuit. Il fait nuit très tôt en décembre dans le Nivernais. Il reste à imaginer une
époque sans téléphone. Il faut alerter les voisins situés au village de
Courcelles à 2 kilomètres qui sont les seuls à posséder une voiture,
susceptible d’emmener ma mère à la maternité de Clamecy à 15 km. A cette époque, on n’accouche plus à
domicile. Mon père s’élance donc sur la neige sur un vélo, en pleine nuit, pour aller
téléphoner depuis la cabine téléphonique du café du village. Le café est fermé
et il doit taper à la fenêtre pour réveiller la propriétaire. La clinique de
Clamecy est informée de l’arrivée de ma mère.
Colonel Perruchet et Mme Perruchet
M Perruchet, Colonel à la retraite, et animateur de l’Amicale créée autour de l’école, est préposé au convoyage dans sa vielle voiture Hotchkiss aux énormes gardes boues. Il s’est entrainé depuis quelques jours à la faire tourner à vide pour qu’au signal, le chauffeur et le véhicule soient opérationnels. Il s’installe au volant de sa Hotchkiss. C'est la seule voiture du village.
Colonel Perruchet (archives Michel Perruchet) |
Mme Perruchet (archives Michel Perruchet) |
M Perruchet, Colonel à la retraite, et animateur de l’Amicale créée autour de l’école, est préposé au convoyage dans sa vielle voiture Hotchkiss aux énormes gardes boues. Il s’est entrainé depuis quelques jours à la faire tourner à vide pour qu’au signal, le chauffeur et le véhicule soient opérationnels. Il s’installe au volant de sa Hotchkiss. C'est la seule voiture du village.
Son épouse, Madame Perruchet va se charger pour la journée des 42 élèves de l’école.
Docteur Barbier
C’est le Docteur Barbier qui procède à l’accouchement. Il deviendra maire de la ville de Clamecy dans la Nièvre puis sénateur de la Nièvre.
L'actualité du 22 décembre 1956
Le même jour, l'actualité du monde se poursuit. A partir de journaux de ce jour que j'ai pu me procurer dans un salon des vieux papiers, j'évoque les informations principales, dont je suis à ce moment là, bien loin !
L’actualité de ce jour du 22
décembre 1956 est concentrée sur les évènements du bloc soviétique. Une
française Raymonde Soubine, 33 ans,
agent des services de renseignements d’un pays du bloc soviétique, la Tchécoslavquie, est arrêtée pour espionnage.
La grève des mineurs hongrois
Les mineurs en grève en Hongrie demandent la démission de M Kadar, le retrait des troupes soviétiques présentes depuis le soulèvement du 23 octobre, des dispositions pour des élections libres. L’insurrection de Budapest dure quelques semaines, fait 2800 morts et 20 000 blessés du côté hongrois et 700 morts et 1600 blessés du coté russe, avant d’être écrasée définitivement en janvier 1957, avec l’exécution de 225 Hongrois accusés d’avoir participé à cette insurrection.
22 décembre 1956 : l'ultimatum des mineurs hongrois |
La grève des mineurs hongrois
Les mineurs en grève en Hongrie demandent la démission de M Kadar, le retrait des troupes soviétiques présentes depuis le soulèvement du 23 octobre, des dispositions pour des élections libres. L’insurrection de Budapest dure quelques semaines, fait 2800 morts et 20 000 blessés du côté hongrois et 700 morts et 1600 blessés du coté russe, avant d’être écrasée définitivement en janvier 1957, avec l’exécution de 225 Hongrois accusés d’avoir participé à cette insurrection.
La crise du Canal de Suez
Le 22 décembre 1956 : La crise du canal de Suez est un conflit
entre l’Egypte et l’alliance entre kla France et le Rotyaume Uni , suite à la
nationalisation unilatérale par l’Egyspte de Nasser du canal de Suez, lieu
stratégique de transport maritime international entre l’Europe et l’extreme orient.
Après l'opération de Suez, qui voit,
à la demande des USA, l’ONU s’interposer dans le conflit entre Israel alliés
des Français et britanniques, et l’Egypte, les dernières forces franco-britanniques
quittent Port-Saïd le 22 décembre 1956.
Sortie du nouveau film de Gallone avec Françoise Fabian
Sur le plan culturel, ce jour
là , Michel Strogoff est le 3ème ouvrage de Jules Verne porté à
l’écran par le metteur en scène italien Carmine Gallone avec l’actrice
Françoise Fabian.
Affiche film Michel Strogoff 1956 |
Publicité Manufrance
Sur le plan commercial, Manufrance, manufacture de Saint Etienne, lance sa publicité pour la machine à coudre Omnia au prix de 32500 francs.
Sur le plan commercial, Manufrance, manufacture de Saint Etienne, lance sa publicité pour la machine à coudre Omnia au prix de 32500 francs.
Naissance de la Dauphine par Renault
27 Décembre 1956 : retour à la maison-école
Pendant le séjour à la clinique, et le congé de maternité, faute de remplaçant, mon père, revêtu de sa blouse grise en coton, rassemble les 2 classes allant de la classe enfantine à la classe de fin d’études.
Dans la journée, je suis installée dans la cuisine du logement de fonction, la pièce la plus chaude. La porte donne sur la classe de ma mère. Une jeune fille me garde mais ma mère vient régulièrement surveiller son bébé.
L’apparition du biberon
Ma mère m'allaite à la naissance. Très vite, son lait
est décrété mal adapté à ma nourriture. Les biberons faciles à nettoyer sont en vente sur le marché. Ils
sont en verre et c’est avec le biberon que je suis nourrie. Le premier lait en poudre apparaît.
Le bain
L’eau courante n’est pas installée dans le logement de
fonctions de mes parents instituteurs. Il faut aller chercher l’eau à la pompe.
Elle est très froide, voire glacée. Elle
est réchauffée au feu de la cuisinière à bois avant d’être versée dans la
cuvette en plastique.
Le bain de bébé en 1956 |
Les langes
Le bébé est emmailloté. Un linge triangulaire est placé
entre les fesses du bébé, et grâce à un savant croisement du même linge et une
épingle à nourrice, le bébé est enveloppé fermement. Puis apparaissent les
brassières et les culottes bouffantes en coton. Les couches en tissu, sont
lavées chaque jour. Le berceau est installé dans la pièce la plus chaude de la
maison, la cuisine, avant d’intégrer la chambre de mes parents puis ma chambre
personnelle.
Mon père me porte emmaillotée en langes 1956 |
Le landau
Le beau landau sert à me promener dans les rues de campagne, protégé par sa capote épaisse. Il sert aussi à me garder, bien calé par des coussins. Il fait froid sur le
carrelage du sol.
Mon landeau en 1956 |
Le pot
Il est en bois avec un petit dossier à l’arrière. Le pot est
installé dans le trou au centre du meuble. C’est un grand progrès. Mon arrière grand-mère Anna Lajeat surveille mes progrès.
Le pot en bois 1955 |