ARRESTATION de Pierre COLIN en 1943
#Challenge AZ
En cette semaine de
« Panthonéisation » de 4 résistants de la dernière guerre
mondiale, je souhaite évoquer mes recherches généalogique et historiques qui
m’ont permis de reconstituer l’arrestation pour faits de résistance d’un de mes
ancêtres généalogiques.
Pierre COLIN 1900-1944 |
Pierre Colin, 6ème enfant d’une famille protestante
Pierre Colin est le sixième enfant et le dernier enfant
d’une famille protestante. Il est né le 11 août 1900 à Toul où sa famille
maternelle (les Schaal) a dû se replier en 1870 du fait de l’annexion de
l’Alsace par l’Allemagne. Il est Lorrain par son père Eugène Colin, Capitaine au
94ème Régiment d’Infanterie qui meurt quelques semaines avant sa naissance et Alsacien par sa mère. Sa
mère Emilie Marceline Schaal élèvera seule les 6 enfants, sans fortune. A la déclaration de la guerre d’août 1914, les 3 frères sont
mobilisés. Pierre poursuit ses études au collège de Toul et obtient son bac en
juillet 1916.
Bulletin de naissance de Pierre Colin 11/08/1900 |
Pierre s’engage dans l’armée en 1918, à 18 ans
Marqué par ces évènements familiaux, le 11 août 1918, à
l’âge de ses 18 ans, il s’engage au 133ème
Régiment d’Infanterie dont son frère Jean-Eugène commande une compagnie. Au lendemain de la première guerre mondiale, Pierre est reçu
au concours de l’école spéciale militaire et entre à Saint-Cyr. Le 2 octobre
1920, à la sortie de l’école, il signe un engagement de 8 ans dans l’aéronautique militaire. Avec le temps, les nombreuses affectations, il est promu Officier
de la Légion d’Honneur
« pour avoir remarquablement combattu au cours des
opérations de mai-juin 1940 ».
Pierre noue des contacts avec la Résistance dès 1940
Après la signature de l’armistice le 22 juin 1940 entre
Philippe Pétain et le 3ème Reich allemand, le commandant Colin souhaite rejoindre la
France libre. Son frère Jean Colin l’en dissuade au double motif qu’il a une
famille et qu’il a une influence à exercer sur les jeunes. Il noue alors des
contacts avec la Résistance naissante. Familialement sensibilisé par l’incorporation
des jeunes Luxembourgeois dans les rangs de la Wehrmacht, il met sur pied une
filière de désertion qui procure à ces jeunes des effets civils, des hébergements
de repli et les orientent vers un maquis ou une organisation de passage de
frontière.
Pseudo "Georges Robert"
Du fait du risque de dénonciation pour organiser la
désertion de l’armée allemande, son action est dangereuse. Son pseudonyme est George Robert (les deux
prénoms de son frère tué en 1916 à Verdun). Six mois durant, il assure la
préparation de l’atterrissage des avions venus d’Angleterre, aménage les réseaux
d’espionnage, recueille des parachutistes. Le commandant Colin devient la
cheville ouvrière de la résistance dans les Cévennes. Il organise des groupes
de combat de près de 2000 hommes. Il organise aussi la désertion des soldats
étrangers incorporés de force dans la Wehrmacht, en particulier luxembourgeois.
Il recueille les déserteurs, leur procure des vêtements civils et les aide à
traverser la frontière. Le 1° octobre 1943, sur de nouveaux indices, le réseau de la
Gestapo se resserre sur le commandant Colin. Une surveillance est exercée. Un soir, un groupe de 18 luxembourgeois soldats doit
déserter avec armes et bagages. Pierre a tout préparé. Mais les soupçons de la
gestapo gagnent du terrain. Un traitre se glisse parmi les déserteurs. L’alarme
est donnée. Les soldats sont arrêtés. Neuf d’entre eux sont accusés de haute
trahison et fusillés sur le champ. Les autres ont envoyés sur le front russe.
Arrestation en 1943
Le 8 octobre 1943 à 10 h du matin, la police allemande
appréhende à son arrivée à Carnon un luxembourgeois connu sous le nom de
Jacques. L’homme se rendait à un lieu de rendez-vous fixé par Maurice Popouneau
en vue de préparer les détails d’une nouvelle désertion. Le soir même Pierre Colin, l’adjudant Maurice Popouneau et
l’ingénieur en chef des poudres Louis Maurel sont arrêtés par la Gestapo, 9 rue
Pasteur à Montpellier, le petit appartement où est installé leur poste de
commandement. Cette arrestation est effectuée dans des circonstances mal
définies.
Selon le site Pierres vives de l'Hérault une collaboration officieuse
s'établit entre les services allemands et français pour la poursuite des
opposants au régime nazi. Cette collaboration se concrétise après la rencontre
entre Oberg, commandant des SS et de la Police et Bousquet, Secrétaire général
de la Police de Vichy, en 1942. Dès lors, la répression prend une nouvelle
envergure, la lutte contre le « terrorisme » mobilise de façon de
plus en plus importante, les forces allemandes, Gestapo, et Wehrmacht et les
forces françaises.
Le rapport de M Ménard, Commissaire central de la Région de Montpellier
Ce qui est horrifiant et renforce cette thèse de l’alliance entre forces françaises
et forces allemandes, c’est que j’ai retrouvé via Internet, le rapport écrit
par le Commissaire de la région de
Montpellier, Intendance de police à Monsieur le Préfet Régional daté du 9
octobre 1943, et signé M. Ménard, commissaire central.
Cette copie de ce rapport est transmise à M Le Chef du service
des relations franco-allemandes en date du 12 octobre 1943.
Il est dit en page 1 : « J’ai l’honneur de vous faire connaître qu’ayant appris que des coups de
feu avaient été tirés hier vendredi 8 octobre 943, dans la rue Pasteur, j’ai
chargé M Giloux , Commissaire de Police de procéder à une enquête.
En page 2 :
« deux personnes sont été arrêtées
au n° 9 de la rue Cronstadt : un nommé COLIN se disant officier aviateur,
plutôt petit et mine, vêtu généralement de gris … Le propriétaire de la maison signale que COLIN portait un
petit paquet à la main en sortant…. Un nommé Davanier… employé au centre de
confection des colis qui, de par ses fonctions est en relation avec la Gestapo,
… a appris que l’arrestation aurait été opéré par les services de la police
allemande, différents d’ailleurs de la Gestapo.
Page 2 du rapport du Commissaire Ménard 12 octobre 1943 |
Tous les trois sont conduit à la Gestapo dans la
« chambre spéciale de questionnement » où ils subissent quatre jours
d’interrogatoires. Ils se confinent dans le mutisme et sont enfermés au fort
d’Aurelle à Montpellier et maintenus au secret. Jugés, ils sont condamnés à
mort le 17 janvier 1944 par le tribunal allemand.
L’acte de condamnation à mort le 17 janvier 1944
L’acte de condamnation porte quatre chefs
d’accusation :
« Le ressortissant Pierre Colin français est condamné à
être passé par les armes pour les actes suivants :
- commandant de l’armée secrété en zone sud,
- espionnage,
- détournement de soldats de leur devoir militaire,
- préparation à des attentats terroristes ».
Le 26 janvier 1944, la police allemande autorise l’épouse et
les deux fils de Pierre à venir le voir à la prison militaire de Montpellier pour
une entrevue de 2 heures. Puis les trois compagnons sont transférés le même
jour par wagon cellulaire, enchainé à ses deux camarades, à la prison de Fort Montluc à Lyon où il
passe des dernières heures dans une cellule sans air et sans lumière.
Exécution le 21 février 1944
Le lundi 21 février 1944, à 16 h, une automobile de la
Wehrmacht transporte les trois condamnés de la prison militaire au lieu
d’exécution le stand de tir de Lyon la Doua. A 16h30, Pierre est placé contre le parapet et trois minutes
plus tard il tombe.
Le site du stand de tir à la Doua. C'est dans le trou du premier plan que fut retrouvé Pierre Colin |
«le 21 février 1944, le ressortissant français Pierre Colin
ancien commandant né le 11 août 1900 à Toul en dernier domicile à Montpellier 4
rue de Verdun a été condamné à mort le 17 janvier 1944 par un conseil de guerre
pour avoir favorisé l ‘ennemi. Le jugement a été exécuté aujourd’hui.
Tribunal du commandement du secteur de l’armée France sud
STL N° 596/43»
Inhumé le 30 septembre 1945 dans la carré d'honneur du cimetière militaire de la Doua à Lyon
Inhumé dans un charnier sur place, il sera réinhumé le 30
septembre 1945 dans le carré d’honneur du cimetière militaire de la Doua, à
quelques mètres de son exécution.
2 commentaires:
Quel parcours ! J'ai aussi des recherches à faire pour un arrière-grand-oncle, il faut que je me penche sur son cas.
très bel article qui me mets les larmes aux yeux...........
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