Jusqu'au
début du XXème siècle, dans les campagnes, chacun portait des sabots en bois sauf les
plus pauvres qui eux étaient contraints d'aller nu-pieds. Le sabotier était
l'un des métiers ruraux le plus implanté en France.
Plusieurs de mes ancêtres
étaient Sabotiers. J'ai pu le constater en effectuant mes recherches pour construire mon arbre généalogique. Trois générations de sabotiers se succèdent de 1802 à 1940. J'ai pu reconstituer ce parcours des générations avec l'aide des archives numérisées du département de l'Yonne, en Bourgogne.
Mes informations de départ
Je disposais de quelques photos de Romulus GODARD et des souvenirs de son arrière-petite-fille, ma mère. Il était sabotier à Chailley. Il venait de la commune de Cerisiers dans l'Yonne, m'a-t-on dit. Personne n'en savait plus. Je connaissais son ancien atelier, petite maison située dans la cour de la maison familiale. Il n'y avait plus d'outil, malheureusement. Par contre le grenier regorgeait de dizaines d'ébauches de sabots que Romulus avait creusé de ses mains, peut-être à l'aide d'une machine. On n'avait pas le droit d'y toucher. Comme si cela restait une richesse insoupçonnée. Sans doute, avait-on vu Romulus passer des heures à travailler et cette interdiction témoignait de la valeur ancienne de ces sabots en cours. Elle témoignait aussi de la fin d'une époque, celle où les habitants de Chailley et des environs portaient les fameux sabots en bois. L'importance de cette activité dans la Forêt d'othe est soulignée par une carte affichée dans le musée communal de Saint Florentin, en cours de réhabilitation. Cette carte réalisée par M MILLOT, ancien Professeur au Collège, indique par un petit sabot en bois, collé sur la carte, l'existence de M GODARD, sabotier à Chailley. C'était mon aïeul. Moi qui ne l'avais pas connu, je décidais de partir à sa recherche.
Comment m'y prendre pour aller plus loin ?
J'ai bien sur commencé à chercher via le site Généanet les traces de la famille Godard. Mais pas d'informations sur Romulus. Je devais donc me plonger, au hasard, dans les archives numérisées. J'ai sélectionné la commune de "Cerisiers", et les actes de "Naissance" et j'ai parcouru les archives patiemment. Avec le risque que cette information soit totalement fantaisiste.
Romulus GODARD, le dernier Sabotier de la famille
Soudain, la joie : le nom de GODARD Romulus Casimir est apparu. Il était bien né à Cerisiers (information exacte !) le 9 mars 1854. Ouf ! Enfin un fil à tirer pour en connaitre plus sur sa filiation. Cet acte mentionne clairement les noms de ses parents Adolphe GODARD âgé de 23 ans, demeurant au hameau des Chapelles, exerçant la profession de sabotier. Son épouse était Eléonore VELARD âgée de 22 ans, manœuvrière. Il me restait donc à remonter la piste. Je décidais de chercher la trace de ses parents dans la même commune. C'était mon hypothèse parce que à cette époque, on circulait peu. Pari réussi.
Page écran archives numérisées Yonne |
Registres de la commune de Cerisiers Yonne |
Soudain, la joie : le nom de GODARD Romulus Casimir est apparu. Il était bien né à Cerisiers (information exacte !) le 9 mars 1854. Ouf ! Enfin un fil à tirer pour en connaitre plus sur sa filiation. Cet acte mentionne clairement les noms de ses parents Adolphe GODARD âgé de 23 ans, demeurant au hameau des Chapelles, exerçant la profession de sabotier. Son épouse était Eléonore VELARD âgée de 22 ans, manœuvrière. Il me restait donc à remonter la piste. Je décidais de chercher la trace de ses parents dans la même commune. C'était mon hypothèse parce que à cette époque, on circulait peu. Pari réussi.
Sabotier dans la Forêt d'Othe
La forêt
d'Othe est une vaste forêt française située entre la Champagne
au nord, et la Bourgogne
au sud. Le sabotier était chargé d'abattre les arbres, les débiter, les
dégrossir. Le bois était celui des charmes très présents dans la forêt d’othe,
au bois dur et résistant, des hêtres, des chênes, des bouleaux. Les femmes
s'occupaient souvent de la finition et des décorations. Les enfants eux étaient en
charge du transport et de l'entretien du feu. Il faut avoir en tête l’imposante
Forêt d’Othe.
J’ai retrouvé deux cartes postales de Fournaudin, datant de 1904.
Le chemin de terre laisse circuler la charrette à travers une épaisse forêt de
hêtres et de charmes.
En Foret d'Othe d'Arces à Fournaudin CPA 1904 |
La Forêt d'othe près de Fournaudin CPA 1910 environ |
A la même époque, une carte ancienne fige pour l’éternité
un bucheron de la forêt d’othe avec sa serpe et son tablier de coton.
Bucheron de la Foret d'Othe CPA 1910 environ |
Une loge
de bucherons datée de 1912 témoigne de la dureté des vies dans la forêt d’othe.
C’étaient sans doute les conditions de vie de mes ancêtres GODARD au XIXe
siècle.
Loge de bucherons de la Forêt d'othe à Sormery Yonne CPA 1912 |
Au milieu du XIXème siècle, la
profession évolue. La demande en sabots devient de plus en plus importante : le sabot est porté par les paysans en campagne et dans les villes également. Les sabotiers ouvrent de plus en plus des boutiques et partagent leur temps
entre bourg et bois.
Sabotiers au travail en Bretagne |
La
première machine à sabots fera son apparition. Les artisans se rapprochent des bourgs,
pour bientôt s'y installer à demeure, leur atelier jouxtant la loge ou la
maisonnette.
Ils ajoutent souvent à leur métier ceux de cabaretier et de
barbier,ce qui sera le cas des GODARD.
Le travail du sabotier
Les grumes de bois étaient débitées en rouelles à la scie-harpon (ou passe-partout) à la longueur d'un sabot, puis fendues selon leur grosseur.
Le creusage des ébauches
|
L'ébauche de la forme extérieure était obtenue à la hache à bûcher . Je me souviens très bien des ébauches entassées dans le grenier de la maison familiale, témoignant du travail de mes ancêtres.
Une ébauche réalisée par Romulus Godard - Grenier familial |
L'étape suivante se fait sur le petit établi sur lequel est fixé un grand sabre orientable, très tranchant, le paroir, avec lequel est façonné l'extérieur de la pièce. Ensuite, vient le creusage sur la coche, à l'aide de la tarière puis de diverses cuillères. Le boutoir est ensuite mis en œuvre pour former semelle et talon. Et c'est parfois l'épouse qui se charge des finitions au racloir, avant de teindre au noir de fumée, au brou de noix ou plus tard au vernis.
Sabot à bride
|
Avec le temps, le bridage apparaît, c'est la pose d'une bande de cuir en forme de croissant à l'avant du sabot, qui va apporter un meilleur confort à la marche.
Ces brides pourront resservir pour plusieurs paires de sabots successives.
Sabotier et Cafetier
C’est
sans doute ainsi que Joseph Adolphe Prudent GODARD est venu s’installer à Chailley,
village actif à l’orée de la forêt d’othe et à 15 km de Fournaudin.
Entreprenant, il crée le Café de l’Union dans la grande rue du village. Il
exerce, pour compléter ses ressources, le métier de cafetier. La diligence qui
relie Chailley à Saint Florentin, s’y arrête et les voyageurs peuvent
s’installer devant la boutique, installée dans la maison familiale.
Son fils, Romulus
GODARD, exercera sa profession de sabotier Grande Rue à Chailley dans un
atelier proche de la maison familiale, que j'ai évoqué plus haut.
Romulus GODARD Sabotier devant son atelier en 1933 |
Il exercera aussi, à la suite de son père, le métier
de Cafetier.
Romulus Godard Cafetier au Café de l'Union à Chailley Yonne |
Son frère Zéphirin GODARD préféra s’exiler à Paris pour exercer le
métier de Limonadier 10, rue Beaurepaire près de la gare du Nord. Il se fera
inhumer dans le cimetière de Chailley dans une stèle de pierre calcaire
surmontée du triangle du libre-penseur. La tradition familiale fut préservée,
laïque et républicaine puisque que les deux frères portaient des prénoms
républicains Zéphirin et Romulus. (un autre sujet d'article !)
Au
début du XXe siècle, les scies mécaniques et les techniques nouvelles se
généralisent. Les
sabots vont être fabriqués en usine à la chaîne. Après la Première Guerre
Mondiale, la profession décline à cause de l'exode rural et l'arrivée des
galoches. Le gendre de Romulus, Alphonse Etienne BOURGOIN installera une Boucherie à côté du Café, activité qui emploiera trois nouvelles générations.
Mes ascendants généalogiques
Grace à Joseph Jean Baptiste GODARD, j'ai été en relation avec un "Cousin"généalogique sur Généanet qui m'a permis de remonter jusqu'à mon ascendant Edmé GODARD né vers 1589, décédé en 1675 à Bellechaume dans l'Yonne. Il me reste à mettre à jour le logiciel Hérédis !