Chailley
est au cœur d’une région peuplée depuis très longtemps, chargée d’histoire,
de travail et de combats, comme nous l'avons vu dans la première partie de cette recherche (Mes ancêtres les Gaulois). Continuons notre promenade à travers le temps.
C'est au Moyen âge, Chailley connaît l'essentiel de son développement. Car le massif forestier du pays d’othe représente un
intérêt politique et économique. C’est une région stratégique située entre le
Comté de Champagne, le Duché de Bourgogne et le Royaume de France. La forêt
permet d’en extraire les bois nécessaires à la construction des ouvrages
militaires, les bois de marine, le charbon de bois, la pierre pour la
construction. Il est possédé par divers
seigneurs laïcs ou ecclésiastiques, les uns vassaux du roi de France, les
autres du Comte de champagne Thibaut IV ou des seigneurs ecclésiastiques de
Sens, l’Archevêque de Sens ou l’Evêque de Troyes. Il est logique que le
défrichement soit un enjeu clé pour exploiter ces richesses locales.
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La Bourgogne au XI° siècle |
Les défrichements monastiques
du 11ème siècle
La
propriété seigneuriale et monastique à Chailley a pour origine les grands
défrichements du XI° siècle, confiés aux moines.
En 1114, l’Abbaye de Pontigny est
bâtie à l’initiative de Hugues de Mâcon, compagnon de Bernard de Clairvaux,
fondateur de l’ordre des Cisterciens, prédicateur de la deuxième croisade.
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Bernard de Claivaux |
Il
sollicite aux seigneurs du pays d’Othe, diverses donations de terres et de
bois. C’est ainsi, par donations et acquisitions successives, que les abbés de
Pontigny développent leurs possessions du Pays d’Othe. Les féodaux gardent
leurs droits et les moines, en contrepartie du défrichement, reçoivent des
droits d’usage. En 1139, Henri Archevêque de Sens puis, en 1145, Herbert le
Gros accordent aux religieux de Pontigny les droits d’usage de Chailley. En
1151, le roi Louis VII, présent à Pontigny, assiste à la donation faite par
Anselme de Trainel de ses droits et métairies de Boeurs et de Chailley.
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Abbaye de Pontigny - Yonne |
La zone
de défrichement est organisée autour des granges. A Chailley, une bergerie et
un petit clos sont installés près des moulins de Chailley et une grange est
édifiée. C’est un vase bâtiment d’exploitation entouré de murs et de fossés. Il
n’y a, à ce moment là ni village, ni paroisse et donc pas de communauté
villageoise. Tous les habitants travaillent à la métairie et paient le cens dû
pour le lopin de terre concédé sur lequel ils ont construit une masure de
chaume. Les maisons des habitants sont situées en haut du bourg actuel. On peut
considérer qu’un habitant de Chailley travaille une journée sur son propre
manse, qu’il doit à la métairie deux jours gratuits et qu’il s’y loue les trois
autres jours.
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Barron Chaillou des Barres - Extrait de "Abbaye de Pontigny" |
La
Métairie de Chailley
En
1519, l’Abbaye de Pontigny donne la métairie de Chailley à bail à 26 manants
pour quatre vingt dix neuf ans au prix de sept cent bichets, moitié blé, moitié
avoine. Le bail de la ferme des dimes est cédé à Jean Chauillot, huissier, puis
à Jean Bollard, hôtelier. Ils ont la charge, en échange, de payer à Etienne
Moreau, administrateur général, interlocuteur de l’abbaye, pour le prix du
bail, trente setiers, moitié froment et avoine, trente aunes de toile et douze
chapons gras.1562, marque une évolution importante pour Chailley. A cette date,
les habitants de Chailley demandent à l’Archevêque de Sens le droit d’ériger
une paroisse. La communauté villageoise de Chailley prend naissance.
La
résistance paysanne
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Plan de Chailley en 1697 |
La
résistance paysanne des villageois de Chailley se développe face aux abus des
moines de Pontigny. L’histoire des relations entre les seigneurs abbés de
Pontigny et leurs manants de Chailley est ponctuée par des procès et des
procédures destinés à obliger à payer les droits seigneuriaux. La colère
paysanne s’exprime, à Chailley, de différentes façons, parfois violentes. En
1654, Etienne Gaubert receveur de la dîme est assassiné. Le même sort est
réservé en 1625 à Toussaint Daulnoy, Procureur fiscal de la prévôté de
Chailley, ou à Claude Moreau sergent grutier chargé du contrôle des droits
d’usage des paysans en 1648 , comme au sergent grutier Pierre Vye, en 1655.
Pourtant les droits continuent à augmenter. En 1678, ils connaissent une
croissance de + 53 %. La grande disette de 1693 accroît encorela hausse des
droits et de l’impôt. Les maigres économies paysannes sont vite épuisées et une
mauvaise récolte accélère la crise. En 1751, un procès s’engage devant le grand
conseil qui condamne les paysans de Chailley en raison de leur refus de payer
leurs redevances. A la veille de la Révolution, à Chailley comme ailleurs, les
villageois considèrent comme illégitimes les droits seigneuriaux et se jugent
légitimement propriétaires des terres qu'ils occupent. L'ancien système agraire
chancèle.